Pour notre dernier réveil, nous
nous offrons une grasse matinée et émergeons à 6h45. Nous profitons du petit
déjeuner autour d’une table, assis et les pieds au sec. Le poêle rallumé
réchauffe la petite pièce et l’usine à eau ronronne dans un coin. Nous nous
offrons le luxe d’un rab de céréales.
Aujourd’hui, c’est notre dernière
journée sur les traces de la Kungsleden et nous allons boucler notre boucle. Il
ne fait toujours pas grand beau, mais le soleil perce les nuages et la lumière
irisée du matin s’enroule autour des sommets jusqu’à redescendre, étincelante,
sur la Kungsleden. Sous ce voile scintillant surgit un troupeau de rennes
sauvages, que nous observons longuement.
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Lumière du matin |
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Simplement magique |
Profitant de mon dos tourné, mes
compagnons sournois m’attèlent les deux pulkas. Je capitule au bout de 20
mètres.
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Même pas mal ! |
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Ok j'ai beau être une tête de mule, je capitule ! |
Avant de quitter le camp, nous
passons dire au-revoir aux Finlandais, qui nous montrent fièrement leurs divers
trucs et astuces pour monter et démonter un camp efficacement. Nous notons
consciencieusement leurs bons conseils, notamment celui de ne défaire les
arceaux que sur leur moitié pour les replier au milieu et rouler la tente le
long de ces demi-tiges. En deux temps trois mouvements la tente est pliée,
alors qu’il nous fallait plutôt quatre temps et quinze mouvements pour la
ranger dans notre sac. Les Finlandais, eux, ne prennent même pas la peine de la
fourrer dans la housse, ils la roulent et l’harnachent sur une pulka, le
dessous sur le dessus. Simple comme hallȯ !
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Le camp des Finlandais, dans notre jardin |
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Cours finnois de roulage de tente |
Nous décollons à 8h45 et prenons
notre temps pour faire la route du jour. 6h pour parcourir 10 km, nous pouvons
nous octroyer des haltes sur les traces de notre passage, 12 jours auparavant.
Nostalgiques, nous faisons une dernière photo de nos carcasses dégraissées
devant les portes du Sarek. Celles-ci se referment derrière nous et nous
repartons plus au nord, vers Saltoluokta, entre contre-bas, au bord du lac.
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La route pour Saltoluokta est tracée |
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La horde sauvage |
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Youpi, la boucle est bouclée ! |
La descente est notre dernier
plaisir et nous glissons à pleines spatules vers le confort douillet du refuge.
Ce n’est qu’une fois arrivés à la porte que nous prenons la mesure du voyage
que nous avons fait. Nous sommes heureux de l’avoir accompli et, je crois, un
peu tristes que cela soit terminé. Un voyage qui se termine au coin d’un bon
feu, un plaid en laine sur les genoux, après avoir enfin pris une douche chaude
et joui d’une heure de sauna avec vue panoramique sur le lac de Saltoluokta
(sauf pour le pauvre Maël qui a toujours de la fièvre). Où on découvre que le
véritable sauna se pratique bien sûr nus, mais surtout avec un seau d’eau versé
sur les braises toutes les 5 minutes. Où certains finissent plus ébouillantés
que d’autres. Où on apprécie une bière plus qu’ailleurs. Où le steak de renne
prévu au dîner nous fait saliver depuis le goûter. Où l’on apprend (et
constate) que la roulade dans la neige après le sauna n’est pas une coutume
suédoise, mais finlandaise. Où l’on accueille l’arrivée du printemps avec
méfiance et curiosité et où l’on se demande quelle température il fait à Paris.
Où l’on pense aux amis, aux compagnons, à la famille. Quand, enfin, on cesse de
ne penser qu’à soi et à sa petite équipée pour se rappeler qu’il y a le monde
autour.
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Le lac du début, on voit clairement qu'on a bien fait de ne pas passer au milieu le premier jour.... |
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Le sauna de l'arrivée |
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La bière de l'arrivée |
En attendant les prochaines
aventures, l’heure est à la digestion. Nous venons de vivre l’épreuve physique
la plus éprouvante du séjour : ingurgiter tout ce que notre estomac peut supporter
en moins de deux heures. Nous rêvions de viande et de légumes, c’est chose
faite. Des saladiers entiers de choux, tomates, haricots, champignons se
déversent dans nos assiettes et nous nous servons des louches entières de
pommes de terre et de céleris. La viande de renne est délicieuse et c’est une
avalanche de saveurs inédites pour nos papilles monomaniaques. Les beurres aux
herbes et à la truffe, les sauces vinaigrées et les creamcheese s’étalent sur
un délicieux pain blanc moelleux. Le tout arrosé d’un vin californien et
ponctué par une mousse au chocolat blanc et au café. Nos estomacs s’emballent
et crient leur désarrois, mais le cerveau ne l’entend pas de cette oreille et
ordonne à la bouche et à l’œsophage d’avaler jusqu’à la dernière groseille du
dessert. Nous sommes terrassés et rendons les armes à 20h30. Il faut nous
allonger pour que l’estomac puisse maintenant faire son travail. Je vous l’avais bien dit, bougonne-t-il.
Et le corps entier de lui répondre : bosse
un peu fainéant, c’est ton tour à présent !
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